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Mondher MAHJOUBI

MD

    CEO et Président du Directoire d’Innate Pharma

Innate Pharma

L’immunothérapie s’étend à d’autres cancers : cancer du rein, de la vessie, hépato-carcinome, lymphome de Hodgkin, lymphome non hodgkinien… mais nous ne sommes encore qu’au début de l’histoire !

En tant qu’oncologue médical, j’ai eu la chance de vivre tour à tour l’arrivée des chimiothérapies de nouvelle génération et des thérapies ciblées. Ces dernières ont bouleversé notre conception de la cancérologie puisqu’elles nous ont conduit à définir un cancer moins par son organe d’origine que par les biomarqueurs qui le caractérisent. J’ai aussi connu les déceptions suscitées par les premières immunothérapies, dites non spécifiques, dont l’interleukine, qui permettait déjà d’obtenir des réponses durables chez des patients aux prises avec des cancers très avancés, mais au prix de lourds effets secondaires. Au regard de cette expérience je mesure à quel point les nouveaux anticorps d’immunothérapie constituent une véritable révolution médicale.

En restaurant la capacité des lymphocytes T du patient à reconnaitre et tuer les cellules cancéreuses, ces anticorps ont conduit à des réductions tumorales spectaculaires dans des cancers de très mauvais pronostic comme le mélanome avancé ou le cancer du poumon non à petites cellules. Chez un nombre significatif de ces patients, la survie est ainsi passée de quelques mois à plusieurs années et, avec le recul, on peut désormais affirmer que leurs lymphocytes ont été durablement « rééduqués », laissant entrevoir la possibilité de guérir certains cancers et non plus seulement de les traiter.

Aujourd’hui, congrès après congrès, l’immunothérapie s’étend rapidement à d’autres cancers : cancer du rein, de la vessie, hépato-carcinome, lymphome de Hodgkin, lymphome non hodgkinien… mais nous ne sommes encore qu’au début de l’histoire ! Les gains de survie constatés sont en effet le fruit d’une première génération d’anticorps qui s’appuie sur l’action des seuls lymphocytes T et ne visent qu’une fraction des molécules qui contrôlent leur activité (CTLA-4 et PD1/PD-L1).

Nous sommes encore loin de tirer parti de toutes les potentialités de notre système immunitaire. Pour vaincre les résistances des cellules cancéreuses, nous sommes en train d’élargir notre palette d’immunothérapies mais aussi d’apprendre à les combiner, entres elles et avec les autres standards de traitement : cibler simultanément plusieurs points de contrôle de la réponse immunitaire, mobiliser différents acteurs de l’immunité et parfaire l’association de ces immunothérapies avec la chimiothérapie, la radiothérapie les thérapies ciblées ou cellulaires.

Cela a évidemment d’énormes conséquences en termes de développement. Progressivement de nouvelles « combinaisons intelligentes » devrait se substituer à la logique inflationniste du ”treat to progression” et des traitements à vie. Le vieux rêve qui vise à réinitialiser la réponse immunitaire innée du patient pour faciliter l’effet d’une seconde immunothérapie puis à « terminer le travail » à l’aide d’un autre médicament semble presque à portée de mains. Ces développements sont évidemment complexes à mettre en œuvre mais je suis convaincu que la guérison sera au bout !

J’ai participé à cette révolution en cours chez Roche, Genentech puis AstraZeneca et aujourd’hui chez Innate Pharma. En 2016, Innate a confirmé les premières preuves de concept clinique des nouvelles immunothérapies NK : dans un lymphome rare avec l’anticorps IPH4102 (qui force la destruction des cellules cancéreuses par les cellules NK) et dans les cancers de la tête et du cou avec une combinaison associant les anticorps lirilumab (qui cible les KIR, des radars de surface qui contrôlent l’activité des cellules NK) et nivolumab (qui cible PD1, un radar des lymphocytes T). Aujourd’hui, notre partenaire Bristol-Myers Squibb conduit une étude randomisée de phase II qui teste pour la première fois les bénéfices de la triple combinaison lirilumab - nivolumab - ipilimumab (un anticorps qui cible CTLA-4, un autre radar de surface des lymphocytes T) dans ces mêmes cancers. Avec AstraZaneca, nous explorons aussi le potentiel clinique de monalizumab (un anticorps qui agit simultanément sur les cellules NK et les lymphocytes T). Nous continuons bien sûr à développer des armes complémentaires : des anticorps qui ciblent des cellules à la double personnalité comme les macrophages et les neutrophiles et de nouveaux formats d’anticorps (anticorps bispécifiques ou conjugués à des toxines).

Ces avancées d’Innate Pharma sont aussi celles de Marseille Immunopôle, qui a déjà lui aussi obtenu sa « preuve de concept » puisque la découverte et l’évaluation clinique de ces immunothérapies NK sont en partie le fruit du travail de laboratoires de recherche et d’hôpitaux marseillais. Fort de ce succès, notre objectif est de faire du cluster une source et un accélérateur d’innovation incontournable en immunothérapie. Les partenariats de R&D que nous conduisons avec les grands leaders mondiaux du domaine démontrent que nous sommes incontestablement sur la bonne voie.

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