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Projet EXPLORE COVID-19 : le blocage de la voie C5a/C5aR1 stopperait l’inflammation délétère dans les cas graves de la COVID-19

Date : 29 juillet 2020
Category : Actualité,MI Live


  • Les niveaux sanguins de C5a, un peptide hautement inflammatoire de la cascade du complément, augmentent avec la sévérité de la maladie.
  • C5a et son récepteur C5aR1 sont fortement exprimés dans les poumons des patients atteints de forme sévère de la COVID-19.
  • En bloquant le récepteur C5aR1 l’anticorps monoclonal avdoralimab, empêche l’activation et la migration des cellules myéloïdes pro-inflammatoires in vitro et les lésions pulmonaires aiguës in vivo.
  • Les résultats définitifs de l’étude sont publiés ce jour dans Nature

La COVID-19 est une maladie infectieuse causée par un nouveau coronavirus baptisé SARS-CoV-2. Si la plupart des patients infectés présentent peu ou pas de symptômes, 15 % d’entre eux évoluent vers une pneumonie sévère et environ 5 % vers un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA). Ces cas graves résultent d’une réponse inflammatoire excessive, associée à ce que l’on appelle une “tempête de cytokines”. Pour mieux comprendre la réponse immunitaire au cours de la progression de la maladie, le programme de recherche EXPLORE COVID-19 a entrepris une analyse longitudinale des paramètres immunitaires dans une cohorte de 82 patients à différents stades de la maladie.

Le rôle pro-inflammatoire du duo C5a/C5aR1

Après avoir confirmé que la gravité de la maladie était associée à une augmentation globale des quantités de cytokines inflammatoires dans le sang, les chercheurs se sont intéressés au facteur C5a un peptide de la cascade du complément qui semble jouer un rôle clef dans l’inflammation et les lésions pulmonaires. Ils ont ainsi observé que le taux de C5a augmentait avec la sévérité de la maladie, non seulement dans le sang mais aussi dans les poumons, où son récepteur, C5aR1, est fortement exprimé à la surface des cellules myéloïdes (neutrophiles et monocytes). L’étude a également révélé que l’axe C5a/C5aR1 déclenchait une réponse inflammatoire in vitro. Ainsi, une fois activé par des protéines du SARS-CoV-2, C5a favorise la migration vers les poumons des cellules myéloïdes pro-inflammatoires exprimant le C5aR1.

Bloquer le déclencheur à l’aide de l’anticorps avdoralimab

Pour bloquer l’action pro-inflammatoire du duo C5a/C5aR1 dans la COVID-19, les scientifiques ont utilisé l’avdoralimab, un anticorps monoclonal dirigé contre le C5aR1 humain. Développé par ailleurs en oncologie, cet anticorps empêche la liaison du C5a à son récepteur. In vitro, ils ont démontré que l’avdoralimab inhibe l’activation et la migration des neutrophiles et la libération de cytokines inflammatoires par les monocytes. Les chercheurs ont alors évalué l’effet de ce même anticorps sur des souris exprimant le C5aR1 humain et présentant des lésions pulmonaires aiguës induites par le C5a. En réponse au traitement, on observe une réduction de l’inflammation pulmonaire (moins d’infiltration par les neutrophiles et les monocytes, moins d’albumine libérée, moins de signes histo-pathologiques de lésions pulmonaires aiguës). Ces résultats prometteurs sont en outre étayés par plusieurs études qui semblent confirmer les effets bénéfiques des traitements ciblant la voie C5a/C5aR1 dans les formes sévères de la COVID-19.

Au-delà des poumons, prévenir l’endothélialite associée à la COVID-19

De nombreux travaux suggèrent que le virus du SRAS-CoV-2 se propage au-delà de la barrière épithéliale pulmonaire, notamment dans le système vasculaire où il provoque l’inflammation des cellules endothéliales (le revêtement interne des vaisseaux) ou endothélialite. L’examen post-mortem et post-opératoire des tissus de patients COVID-19 a révélé plusieurs cas d’endartérite oblitérante (une inflammation de l’endothélium associée à une accumulation de macrophages exprimant le récepteur C5aR1 autour des vaisseaux et dans le thrombus). Ces données, conjuguées aux taux sanguins élevés de C5a des patients symptomatiques, suggèrent que, dans les formes sévères de la maladie, le duo C5a/C5aR1 contribue à la transition d’une forme épithéliale vers une forme endothéliale de très mauvais pronostic. Sur la base de ces résultats, un essai clinique de phase II randomisé en double aveugle, baptisé FORCE (FOR COVID-19 Elimination), a été lancé pour évaluer la sécurité et l’efficacité de l’anti-C5aR avdoralimab chez les patients COVID-19 atteints de pneumonie sévère.

Figure. La progression vers un COVID-19 sévère est associée à une transition d’une maladie épithéliale à une maladie endothéliale.

Ces résultats sont le fruit des efforts concertés de plusieurs membres de Marseille Immunopôle : les services d’urgence, de soins intensifs et de médecine interne des Hôpitaux Universitaires de Marseille - AP-HM (Hôpital de la Timone et Hôpital Nord) et de l’HIA Laveran, la plateforme d’immunoprofiling MI/AP-HM et la société de biotechnologie Innate Pharma. En réponse à la pandémie, le cluster MI a démontré sa capacité à se mobiliser vite, efficacement et rigoureusement pour enrichir nos connaissances de la COVID-19, démontrer le potentiel thérapeutique de la voie C5a/C5aR1 dans les formes sévères et lancer un essai clinique randomisé avec l’anti-C5aR avdoralimab dans cette indication.

Article :
Julien Carvelli, Olivier Demaria, Frédéric Vély, Luciana Batista, Nassima Chouaki Benmansour, Joanna Fares, Sabrina Carpentier, Marie-Laure Thibult, Ariane Morel, Romain Remark, Pascale André, Agnès Represa, Christelle Piperoglou, the Explore COVID-19 IPH group, the Explore COVID-19 Marseille Immunopole group, Pierre Yves Cordier, Erwan Le Dault, Christophe Guervilly, Pierre Simeone, Marc Gainnier, Yannis Morel, Mikael Ebbo, Nicolas Schleinitz, Eric Vivier. Association of COVID-19 inflammation with activation of the C5a-C5aR1 axis. Nature 2020. https://www.nature.com/articles/s41586-020-2600-6


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